REVERIES D’UNE « CONFINEE »
- Jacques-Brice MOMNOUGUI
- 8 mai 2020
- 3 min de lecture
Ne pouvant écrire les Rêveries d’une promeneuse solitaire, je vais me contenter de mes rêveries de confinée solitaire !
Une confinée solitaire qui constate, jour après jour, que le Confinement nous conduit à penser autrement … ou peut être simplement à recommencer à penser, … à relire aussi des livres que l’on a aimés, et que la vie active, trépidante, nous a fait peu à peu oublier.
Ainsi en est-il d’une songerie panthéiste de Jean Giono, retrouvée dans ma bibliothèque, et qui m’a laissée rêveuse :
« il n’y aura de bonheur pour vous que le jour où les grands arbres crèveront les rues, où le poids des lianes fera crouler l’obélisque et courbera la Tour Eiffel »
Je me suis alors prise à rêver… à la perception grecque de la Nature, et mon esprit peu à peu a vogué vers Homère, et ses principes de vie : « la nature comme socle, l’excellence comme but, la beauté comme horizon » …
Nerval et ses « Vers dorés » sont aussi revenus à mon esprit :
« Homme, libre penseur, te crois - tu seul pensant
Dans ce monde où la vie éclate en toute chose
Des forces que tu tiens, ta liberté dispose
Mais de tous tes conseils l’univers est absent
Respecte dans la bête un esprit agissant
Chaque fleur est une âme à la Nature éclose
Un mystère d’amour dans le métal repose
Tout est sensible et tout sur ton âme, agissant.
Crains dans le mur aveugle un regard qui t’épie
A la matière même un verbe est attaché
Ne la fais pas servir à quelque usage impie.
Souvent dans l’être obscur habite un Dieu caché
Et comme un œil naissant couvert par ses paupières,
Un pur esprit s’accroît sous l’écorce des pierres. »
Je quittais peu à peu notre époque … et m’en trouvais fort bien.
Je me souvins qu’il avait existé une « langue des oiseaux », qui était retour aux sons, aux sifflements, et aux signes.
Je me souvins aussi que l’on retrouvait une mystique dans cette langue, une mystique qui s’élevait du profane au sacré, du mental au plus haut degré de la conscience.
Ainsi, derrière notre langue parlée, existait-il, pour qui parvenait à les ressentir, les vibrations originelles. A l’image de ces lieux de culte, qui répercutent les messages de pierres, et résonnent des vibrations de poseurs de pierre.
Alors pour un instant, je partageais avec les oiseaux le souvenir d’une connaissance primordiale, celle qui existait à l’origine du monde, dans un temps où l’Unité était encore là, telle une évidence. Un temps où l’Un n’avait pas encore subi la castration des mots séparateurs. C’était bien sûr un Temps fort ancien, peut être celui de Daniel le Stylite.
Pourquoi avons-nous oublié la profondeur de cette philosophie de la vie ? Pourquoi sommes-nous toujours dans « l’un ou l’autre », sans vouloir comprendre que c’est « l’un et l’autre », et que comme l’a dit Octavio Paz « l’altérité est la façon dont l’unité se déploie ».
Pourquoi nos esprits occidentaux se sont-ils tant détournés de l’harmonie des contraires ?
Pourquoi avons-nous perdu le respect des Temps originels ?
Pourquoi avons-nous perdu le respect de la Nature … qui maintenant se venge.
« Jamais la nature ne nous trompe ; c'est toujours nous qui nous trompons. », Jean- Jacques Rousseau l’avait déjà prédit !
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